Les principaux
obstacles à mes idées, ce sont les mots. Je pense, je visualise très
bien mon idée, parfois même sans image, et soudain au moment de
l’exprimer, plus rien. Elle devient alors moins belle, terne parfois,
d’autres fois anéantie.
Alors ça en devient presque un deuil. Je
m’agenouille devant elle, mon œuvre inachevée, je lui prends la main, la
baise, et puis je pleure. Le monde en devient presque triste, le soleil
se résume a une averse hivernale ; le chant des oiseaux à un silence
tranchant ; et puis je tombe malade.
Juste avant les funérailles, je commence à aller mieux. Je tourne
encore en rond dans la maison, les murs sont toujours aussi fades, mais
le paysage semble un peu plus ensoleillé. Je ne mange plus, je bois.
Néanmoins je me fais une raison, ce n’était pas la première et ça ne
sera pas la dernière.
Certains jours j’arrive même a rire, à être
heureux, et puis c’est fatal, je vois ses petites couleurs sombrer au
fond du gouffre, dans les abimes de la terre, et là, le contre coup se
fait ressentir : je m'évanoui.
Je rentre tristement chez moi, en trainant les pieds, m’assois dans
le canapé et je m’endors. Je rêve. Je rêve de beaucoup de choses. Ah !
Si mon idée était encore là… Qu’est ce que je ferais… Ou qu’est ce que
je ne ferais pas… Je ne sais pas… Qui sait… Quand… Où… Pourquoi ! Tout
est chamboulé dans ma tête, je tombe, et puis je remonte jusqu’à la
source. Mes pieds touchent le sol.
Je prends peur, je cours, je m'enfuis, je veux échapper à ça, à la dure réalité. Laquelle ? Je ne sais
plus. Je ne l’ai jamais su, je ne le saurais probablement jamais… C’est
celle-là, celle qui est surement universelle…
Je me réveille. J’ouvre les yeux. Je m’assure qu’il ne s’agissait que d’un cauchemar.
Et puis soudain, j’ai une idée…